Critique détaillée de deux colossaux guides Weka pour les organisateurs

15/12/2011

Lapin

Livres, jeux et musique

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Les auteurs :

Les 27 auteurs qui contribuent aux deux guides montrent une large palette de compétences : agents des directions décentralisées du ministère chargé de la jeunesse et des sports (inspecteurs, chefs de service, directeurs départementaux…), responsables enfance ou loisirs de collectivités territoriales, psychologues ou encore dirigeants associatifs. On remarquera la présence d’avocats et de magistrats ainsi que celle de Jean Houssaye. Quelques-uns sont également directeurs d’accueils collectifs de mineurs ou formateurs Bafa et Bafd.
On peut cependant regretter l’absence de cadres des fédérations d’éducation populaire, en dehors de Jean-Claude Bissardon (créateur et directeur de Temps Jeunes), de pédagogues et d’animateurs professionnels qui auraient pu développer les socles théoriques des premières parties « Le CLSH, un projet d’action éducative au service de l’enfant » et « Les centres de vacances au cœur de la politique éducative des vacances des mineurs ».
La moitié des auteurs (14 sur 27) est commune aux deux guides ce qui explique leur proximité.

Voir annexes I « Présentation des contributeurs au guide pratique des centres de loisirs » et III « Présentation des contributeurs au guide pratique des centres de vacances ».

Le prix :

Le  guide pratique des centres de vacances est vendu 89 € TTC + 7,50 € de frais de port (France métropolitaine). Un abonnement de 27 € TTC / mois, en option, offre :
–    le cd-rom, version numérique complète du guide ;
–    les mises à jour semestrielles ;
–    trois P’tits classeurs d’activités ;
–    la lettre d’information bimestrielle Enfance & loisirs ;
–    l’accès illimité au support juridique Weka.
De même, le guide pratique des centres de loisirs est vendu 119 € TTC + 7,50 € de frais de port, et avec un abonnement optionnel de 31 € TTC / mois.

Le paiement s’effectue après réception. L’offre d’essai permet de renvoyer les classeurs aux éditions Weka, après 15 jours maximums de consultation gratuite, « sans autre coût que les frais de retour, sans engagement à l’égard des Editions Weka ». Le coût du colis retour est de 12,95 € (Colissimo France inférieur à 7 kg).

Cet article ne porte pas sur les abonnements, mais seulement sur les guides papier, dont la dernière mise à jour date de juin 2010.
 

La forme : une organisation pratique et très structurée

Ces deux guides se présentent sous la forme de classeurs : 1 classeur pour le guide pratique des centres de vacances et 2 pour le guide pratique des centres de loisirs. Ils sont agencés autour de 7 grandes parties, séparées par des intercalaires, elles-mêmes segmentées en plusieurs chapitres. Les classeurs, de format A5, sont volumineux : plus de 1 200 pages pour le guide pratique des centres de vacances, et plus de 1 500 pour le guide pratique des centres de loisirs.
Les guides semblent être mis à jour en moyenne une fois par an. Ils tiennent compte, bien entendu, du changement d’appellation intervenu en septembre 2006, même si leurs titres conservent les termes centres de vacances et centre de loisirs.

Voir annexes II « Table des matières générale détaillée du guide pratique des centres de loisirs » et IV « Table des matières générale détaillée du guide pratique des centres de vacances ».

 

Le fond : un large catalogue des connaissances nécessaires à l’organisation d’un accueil collectif de mineurs
 

Ces deux guides, organisés de la même manière, proposent des contenus similaires. Il n’est donc pas nécessaire d’acquérir les deux.

Les contenus identiques :
 

Partie II
 

Les deux guides proposent une partie « la réglementation administrative des centres de vacances / de loisirs » qui rassemble et reformule l’ensemble des règles concernant les accueils collectifs de mineurs et contenues dans le Code de l’action sociale et des familles, le Code de la construction et de l’habitation, les arrêtés ministériels et les circulaires et instructions Jeunesse et Sports : classification, déclaration, encadrement, locaux, hygiène alimentaire, activités, transports et contrôle de l’Etat. Les guides ne proposent pas d’interprétation mais simplement une compilation et une explication des textes, illustrées par quelques schémas et tableaux.
La nouveauté pour les animateurs et directeurs sera peut-être dans un paragraphe intitulé « précisions sur les APS (activités physiques et sportives) encadrées par des prestataires extérieurs aux accueils collectifs de mineurs », qui cadre les modalités d’exercice des éducateurs sportifs : champs d’application, condition d’exercice, etc.
Tous les textes sont repris en intégralité en annexe.

Partie III
 

Les deux guides proposent également une partie « les responsabilités liées au fonctionnement du centre de vacances / de loisirs » qui propose une approche synthétique classique responsabilité civile – responsabilité pénale.
La partie consacrée à la responsabilité civile souffre malheureusement de quelques erreurs importantes : les juges paraissent très sévères et semblent affirmer que « la surveillance des mineurs doit être constante » (hors la jurisprudence est plus modérée, notamment en fonction de l’âge des enfants), et surtout cette partie entretient une confusion entre la responsabilité contractuelle et la responsabilité délictuelle.
La partie consacrée à la responsabilité pénale offre un large panorama et apporte les bases essentielles : éléments légal, matériel et moral de l’infraction, distinction entre infractions intentionnelles et non intentionnelles, inventaire des infractions, restriction du « règlement » depuis la loi du 10 juillet 2000 et pénalisation des infractions au CASF depuis 2001. Les nombreux exemples perdent hélas de la valeur en étant généralement dépourvus de références jurisprudentielles. Cette partie offre deux faces contradictoires : d’un côté des formulations et des enchaînements logiques clairs et précis, et de l’autre une structuration globale peu classique, non hiérarchisée et sujette à répétitions. L’absence du principe d’individualisation des peines, pourtant fondamental, est également regrettable.
Enfin, cette partie apporte quelques éléments afin de bien choisir ses contrats d’assurance en posant questions pertinentes plutôt qu’en apportant des réponses.

Partie V
 

À la manière de la partie II consacrée à la réglementation, les deux guides proposent une partie pompeusement intitulée « droit du travail et statut des personnels » qui rassemble et reformulent de la même façon un ensemble de règles connues et facilement accessibles : formations, diplômes, convention collective de l’animation et types de contrats.

Partie VI

Les deux guides détaillent sur plus de 80 pages les généralités de la connaissance de l’enfant. Cette partie est classiquement articulée autour de deux approches, développement intellectuel et développement affectif, complétées par des thématiques centrales de l’animation : la séparation, le jeu, l’autorité, la violence, la maltraitance et la mixité. La rédaction s’appuie largement sur les travaux de Sigmund Freud et de Jean Piaget et n’hésite pas à détailler et à expliciter certaines théories, tout en créant des liens avec d’autres penseurs. L’ensemble est cohérent et argumenté. Les animateurs et directeurs y trouveront de solides approfondissements par rapport aux bases de la formation Bafa – Bafd  et du Web.
Une mise en avant des travaux d’Henri Wallon aurait permis de nuancer la segmentation inspirée de Jean Piaget. L’absence de certains concepts psychanalytiques fondamentaux comme le refoulement ou la dualité des pulsions de vie et de mort est surprenante. Plus surprenant encore est l’absence – voulue ? – d’éléments du développement physique : les rythmes de vie, la croissance, la dissociation et la coordination motrice ne sont pas mentionnés, tandis que la puberté est expédiée en une ligne « c’est la puberté, le corps de l’adolescent se transforme. L’adolescent doit faire face à ce nouveau corps » !

Partie VII
 

Cette dernière partie est complètement dépouillée : elle propose quelques éléments juridiques et matériels très basiques sur l’animation multimédia.

Les différences :

Partie I

Le guide pratique des centres de vacances présente un rapide historique des colonies, reprenant l’évolution classique, depuis les centres hygiénistes, en passant par les colonies à identité catholique ou communiste, et jusqu’à l’éducation nouvelle de l’après-guerre. Petite nouveauté : le guide propose une comparaison de journées type en fonction de chaque système.
Ce guide propose également une approche classique du projet : finalité, objectifs généraux, intermédiaires et spécifiques, moyens, indicateurs d’évaluation et méthodes de communication. Il liste quelques questions qui aident à définir la future organisation du séjour.

Partie III

Le guide pratique des centres de vacances propose un approfondissement de la responsabilité civile, organisé autour de quatre « cas pratiques (1) » et abondamment illustrés par plus de cinquante décisions de justice sur 48 pages. Ce chapitre 1/1.3 apporte également de nombreux éléments sur le contentieux du droit du sport (niveau du pratiquant, importance des consignes et partage des responsabilités avec le prestataire) qui est rarement connu des acteurs de l’animation. Il est très surprenant que les éditions Weka n’aient pas jugé utile de reprendre ce niveau de détail dans le guide pratique des centres de loisirs !

Partie IV

Le guide pratique des centres de vacances rassemble des éléments basiques et concrets, tels ceux qui sont abordés en formation Bafd, sur la direction d’un séjour de vacances : techniques de recrutement, principes généraux du management et de la communication, documents et affichages obligatoires, économat, outils d’organisation de la vie quotidienne etc. Cette partie, de plus de cinquante pages sans les annexes, est évidemment plus détaillée que les synthèses fournies par les organismes de formation ou par le hors série « spécial directeur » de la Jeunesse au Plein Air.
Le guide pratique des centres de loisirs, quant à lui, s’adresse définitivement aux organisateurs dans cette partie, qui aborde les fonctions et les compétences du directeur. Moins d’éléments concrets mais plus de pistes de réflexions afin d’aider les organisateurs à clarifier leurs attentes vis-à-vis du directeur. Il pose également des bases solides de comptabilité et de gestion, qu’ignore le guide pratique des centres de vacances. Cependant, ce chapitre 5 intitulé « la gestion financière » s’avérera probablement confus pour les néophytes.

Partie V

En plus des généralités rassemblées par les deux guides, le guide pratique des centres de loisirs propose tout un chapitre consacré au statut de droit public, qui sera un rappel traditionnel pour les directions des ressources humaines des collectivités.

Partie VII

Le guide pratique des centres de loisirs propose, en plus du chapitre sur l’animation multimédia, deux chapitres consacrés respectivement au dessin, à la peinture, et aux activités scientifiques, qui n’ont pas été repris dans le guide pratique des centres de vacances. L’approche scolaire décevra probablement nombre d’animateurs, malgré quelques formulations claires.

En conclusion :

Ces deux épais classeurs présentent donc des parties très inégales : certaines ne sont que des compilations de textes facilement accessibles sur la toile, telle la partie II réglementation, d’autres sont des travaux approfondis et inédits, tel le chapitre 1/1.3 « Cas pratiques en matière de responsabilité civile » du guide pratique des centres de vacances. Les absences au sein d’une même partie sont d’autant plus remarquées que certains points sont par ailleurs très fouillés et achevés. C’est le cas de l’absence criante de référence au développement moteur et sensoriel de la partie VI consacrée à la connaissance de l’enfant, alors que le chapitre 1/1.1.1 « Le développement cognitif de l’enfant : quelques repères sur son développement intellectuel » regroupe et détaille les travaux de Jean Piaget et que le chapitre suivant 1/1.1.2 « Le développement affectif de l’enfant » apporte un éclairage transversal et précis sur la construction psychoaffective de l’enfant (Sigmund Freud, Karl Abraham, Mélanie Klein, René Spitz et Donald Winnicott).

L’achat de ces deux recueils peut être justifié pour des amateurs (responsables associatifs par exemple) mais inutile pour les animateurs et directeurs, en raison du coût élevé pour une acquisition individuelle.

Les guides évoluent : …

En pièces jointes ci dessous les 4 annexes à cet article.

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(1) Il s’agit plus exactement d’approches thématiques que de cas pratiques au sens du Droit

 

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