Miel (film) – l’enfance de Yusuf

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    ludou
      @ludou
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      ludou
        @ludou

        Un film très particulier de Semih Kaplanoglu (réalisateur turc), sans musique, que le son du film. C’est le dernier d’une trilogie qui raconte la vie du poète Yusuf (la trilogie se termine par l’enfance !)

        Synopsis :

        Yusuf a 6 ans, il vit avec ses parents dans un village isolé d’Anatolie.

        Pour le petit garçon, la forêt environnante est un lieu de mystère et d’aventure où il aime accompagner Yakup, son père apiculteur. Il le regarde avec admiration installer ses ruches et récolter le miel à la cime des arbres.

        Les abeilles se faisant de plus en plus rares, Yakup est obligé de partir travailler plus loin dans la forêt. Mais il tarde à revenir, et le monde se retrouve soudain plein de son absence.

        Miel a obtenu l’Ours d’Or de meilleur film du Festival De Berlin 2010. Cette récompense lui a été décernée par le jury présidé par Werner Herzog.

        critique du Monde

        Ces deux films font partie d’une trilogie que Semih Kaplanoglu avait commencée avec Yumurta (“Œuf”), présenté à la Quinzaine des réalisateurs de Cannes en 2007, et sorti en salles quelques mois tard. Süt (“Lait”), qui sort sous le titre anglais Milk, fut sélectionné à la Mostra de Venise en 2008, et Bal (“Miel”) au Festival de Berlin en 2010, où il a obtenu l’Ours d’or.

        Le héros de cette trilogie, dont nous suivons la vie selon une chronologie inversée, comme un long flash-back, est un certain Yusuf, poète. Un personnage inspiré par sa propre jeunesse. Dans Yumurta, il était âgé de 40 ans et revenait dans son village natal pour enterrer sa mère.

        Dans Milk, nous le retrouvons à 18 ans, alors qu’il commence à être publié dans des revues littéraires tout en vivant toujours chez sa mère, dont il a du mal à accepter le désir d’entamer une relation intime avec le chef de gare. Dans Miel, il a 6 ans, et vit avec ses parents dans la campagne d’Anatolie. Le métier de son père, apiculteur, suscite en lui une admiration dévote. A l’aise dans les majestueuses forêts magiques avec le prospecteur de ruches noires, il perd ses moyens, bégaie en classe, reste mutique avec sa mère. La mort accidentelle de son père le plonge dans un désarroi.

        Au-delà de l’époque

        Le choc, quand on voit un film de Kaplanoglu, dépouillé de musique et presque sans paroles, voué aux bruits animaliers, aux échos du vent ou de la pluie, est le défilé d’émotions, le chaos de sensations qui, dans les deux premiers films, ramènent sans cesse le héros à sa petite enfance, et dans le troisième le confrontent à ses rêves. Ce cinéaste a une approche du temps qui nous mène bien au-delà de l’époque où vivent ses personnages, et une façon de les regarder qui nous fait pénétrer dans leur âme. Il parle de son style comme d’un “réalisme spirituel”, de son art comme d’une scrutation de la vie “à la lumière des puissances supérieures”.

        Dans Yumurta frappait d’emblée une façon d’égrener de petits gestes anodins qui prenaient valeur de symbole. Une fleur dans un pot, un bol de lait, un puits envahi d’herbes, l’odeur d’un oignon, et cet oeuf annoncé par le titre, signe de la séparation avec la mère, de l’heure de briser sa coquille. La trilogie est bâtie sur ce lien du fils et de sa mère, lien forcé quand celle-ci se retrouve veuve et confrontée à un petit garçon fracassé par la disparition de son modèle paternel dans Miel, lien rompu lorsque Yusuf doit accepter la sexualité de celle qui l’engendra et renoncer à vivre de ce qui le nourrissait jusque-là, l’économie laitière, dans Milk, film du sevrage.

        Chez Kaplanoglu, la mère est aussi tradition. Les films parlent autant d’émancipation que de rupture avec un monde voué à disparaître. Ils dépeignent le choc entre la beauté d’un monde rural, ancestral, une nature inviolée, et la modernité. La modification du paysage, le passage de l’agriculture à l’industrie, de la terre à l’usine. Il regrette un temps où l’oeuf était pondu dans le poulailler familial, le lait produit dans une économie domestique, le miel récolté dans le respect de la nature.

        Milk et Miel débutent par une scène où un être humain est suspendu la tête en bas. Une jeune fille soumise à une sorte d’exorcisme destiné à faire sortir le serpent qui s’était introduit en elle par sa bouche dans Milk, le père à la merci d’une branche qui ne va pas tarder à craquer dans Miel. Kaplanoglu voit sa Turquie défigurée, son paradis à l’envers. Yusuf, tout au long de ces trois films, reste taiseux, fragile, introverti. La poésie sera son refuge. Les animaux, dont Kaplanoglu justifie la présence par une fidélité aux rapports qu’entretiennent les bêtes et les hommes, surgissent comme reflets de l’inconscient.

        Le serpent de Milk que l’on a vu extirper d’un corps féminin par l’effet de la fumée réapparaît dans la cuisine de la mère de Yusuf, lorsque celle-ci entame une relation intime avec un homme étranger au foyer. Le film se termine par une séquence métaphorique dans laquelle Yusuf enlace un énorme poisson-chat. Dans Miel, Yusuf gamin apprend à réciter Le Lion et le Rat ou L’Aigle et la Tortue. Une biche passe à côté du père en crise d’épilepsie. Les abeilles meurent. L’espace devient inhabitable.

        Limpide, élégiaque, radieux dans sa manière d’évoquer les épreuves de Yusuf, le cinéma de Kaplanoglu apaise, fascine, grandit. Les scènes où Yusuf côtoie des jeunes filles sont empreintes de timidité et de respect. Il n’y a chez lui que contemplation là où d’autres succombent à la complaisance esthétique, y compris dans ses fins qui n’ont d’énigmatiques que les apparences. Milk : une lampe aveuglante comme un soleil. Miel : un seau d’eau où se reflète la lune. La lampe est celle d’un jeune homme travaillant à la mine et qu’illuminent ses espoirs de devenir écrivain. La lune est ce qui brille la nuit, à l’heure du deuil, quand ont résonné les prières. Deux façons, pour Kaplanoglu, de signifier le caractère instinctif et sacré de ce en quoi croit son héros, son double : la poésie.

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