L’adolescence, une seconde naissance (2/3)

18/12/2002

Periwinkle

Connaissance de l’adolescent

L’adolescence, une seconde naissance

(tiré du dossier du formateur BAFA/BAFD – Familles rurales)


Toutes les citations en italique sont extraites de la cause des adolescents.

Une société sans rites de passage

Si les adolescents étaient encouragés
par la société à s’exprimer, cela les
soutiendrait dans leur évolution difficile.

Afin d’exorciser l’angoisse des jeunes, les sociétés traditionnelles avaient ménagé toute une série de rites d’inititations qui permettaient au jeune de se repérer dans le temps et de rompre son isolement. C’est la société toute entière qui ritualisait le passage. Tous ces rites de l’Australie à l’Afrique, de la Terre de Feu à l’Océanie avaient comme dénominateur commun une “dramaturgie de la mort initiatique”. La séparation symbolique d’avec les mères était représentée, manifestée par le rituel.

“On fait avaler aux enfants des connaissances sans faire les expériences qui ont permis à ce savoir de faire partie du patrimoine culturel”

Ces rites parfois rudes, ont disparu de nos sociétés industrialisées. De fait, l’adolescent est renvoyé à lui-même. Il ne peut s’identifier au père ou au maitre, encore fortement idéalisé dans les sociétés pré-industrielles. L’instruction obligatoire va dévaloriser l’habileté manuelle. C’est parfois à l’intérieur des sectes que les plus faibles vont trouver leur dominateur. F. Dolto pense que le “projet de vie” peut en partie compenser cette perte de rite de passage qui n’a plus sa place dans notre société. La première étape est de pouvoir gagner un peu d’argent et de lentement accéder à cette autonomie financière gage d’émancipation. Mais en cette matière, les choses sont encore bien difficiles pour les jeunes. C’est pourtant avec force que F. Dolto propose des mesures très concrètes comme l’accès des TUC aux quinze ans ou l’avancement de l’âge du service militaire permettant aux jeunes d’accéder plus tôt au statut d’objecteur de conscience. Les propositions pour utopiques qu’elles soient, témoignent d’une réelle inquiétude chez la psychanalyste.

La sexualité et l’amour

“Il est perdu, condamné pour n’avoir pu
se risquer dans l’amour avec un autre et
s’être replié sur l’amour de son image
visuelle au lieu de l’amour d’un autre.
Il était dans l’amour d’un paraître à son image, et pas d’une autre créature
qui se fait connaître par sa voix, issue
d’un corps qui paraît sous un autre aspect
que le sien…”

C‘est dans le “complexe du homard” (et c’est sans doute parce qu’elle s’adresse directement aux adolescents) que F. Dolto est la plus convaincante. Simplement mais surtout parce que Dolto est capable de donner toute sa dimension, y compris spirituelle, à la sexualité humaine, sont évoqués la sexualité des filles et des garçons, la maternité, les caresses, le plaisir solitaire, l’inceste, l’homosexualité mais surtour l’amour, cette force prodigieuse qui défie le temps, la mort et les lois. Elle souligne de façon classique en psychanalyse les pièges du narcissisme qui guettent l’adolescent. Elle regrette que les procédés de la contraception soient mis en avant sans que soit évoqué en parallèle la grandeur de la conception. Au-delà des contenus qui restent assez classiques, c’est le ton qui touche : simple, vrai et empreint de cette véritable noblesse qui se dégage du propos des grands humanistes.

L’amitié

Il y a quelque chose qui existe tout de même, je crois

chez les adolescents, quelque chose qui n’a pas changé, c’est leur

préférence pour l’amitité. La croyance que l’amitité existe et je crois que
c’est quand ils perdent ça qu’ils n’ont plus rien du tout.

Seule l’amitié leur rend la vie viable.


Dans le profond désarroi qui caractérise cette étape de la vie, la valeur refuge, souvent la seule, c’est l’amitié. Livré à ses propres forces, le jeune est dans l’impossibilité de se structurer. Il recherche son double, son alter ego. Le groupe apporte union, partage, identification avec cet effet de miroir important à cet âge, les parents ont perdu le prestige que leur accordait l’enfance. Qui donc va être le premier éducateur ? D’abord, et avant tout l’autre adolescent, les copains.

Mais la bande peut devenir un piège car elle ne fait que reproduire de façon régressive l’union fusionnelle de la petite enfance. L’amitié authentique réside dans la découverte de l’autre. “Tu n’es pas comme moi et c’est très bien. Je t’aime comme tu es. Et j’aime la différence qui réside entre nous”. Quelque chose de décisif se dénoue là, quand cette expérience profonde peut être faite.

Tout ceci explique sans doute que la plus cruelle expérience que puisse faire un adolescent est celle de l’amitié trahie. “Comme on ne trouve de motivation que dans la foi en soi-même, si les amis trahissent, on est comme dépossédé”.


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