L’adolescence, une seconde naissance (3/3)

18/12/2002

Periwinkle

Connaissance de l’adolescent

L’adolescence, une seconde naissance

(tiré du dossier du formateur BAFA/BAFD Familles rurales)


Toutes les citations en gras sont extraites de la cause des adolescents.

Les parents, les adultes, la société

“Parentectomie !
L’image chirurgicale est dure mais elle exprime bien qu’il faut couper dans le vif pour que l’adolescent prolongĂ© se libĂšre enfin des attaches familiales.

La priorité des priorités : établir la confiance. Les difficultés des adolescents sont aggravées par les comportements des adultes chargés de les encadrer.

Les parents, quant Ă  eux, cessent d’ĂȘtre un absolu. Ce que doit conquĂ©rir le jeune homme et la jeune fille, c’est son autonomie. Le cercle restreint de la famille ne lui suffit plus, c’est le monde entier qui va devenir l’Ă©ducateur.

“Ce dont les adolescents souffrent le plus, c’est de voir leurs parents vivrent Ă  l’image de leurs enfants et se mettre Ă  les concurrencer.
C’est le monde Ă  l’envers. Les hommes ont maintenant des petites amies de l’Ăąge de leurs enfants et les femmes aiments plaire aujourd’hui aux copains de leurs fils, parce que justement elles n’ont pas vĂ©cu leur adolescence.

Elles sont piĂ©gĂ©es dans l’identification de leurs enfants…”

Mais il ne s’agit pas de
rompre l’Ă©lastique.”Vas-y, fait tes expĂ©riences,
mais nous sommes toujours lĂ  en cas de besoins”.
Un adulte ne doit pas voir trop clair dans le coeur
d’un jeune : il est trop facile de briser les rĂȘves
et les utopies dans l’oeuf. Ce que le jeune recherche
ce sont les actes et pas les mots. Une morale verbale
qui ne se mesure pas Ă  l’aune de l’action est perçue
comme thĂ©orique. Les adultes, cessant d’ĂȘtre tout pour
l’adolescent, doivent eux-mĂȘmes redĂ©couvrir qu’ils existent
aussi pour autre chose que leurs enfants, qu’ils ont
une vie publique, qu’ils ont des amis, une sexualitĂ©
et que leur vie ne se circonscrit pas au cercle Ă©troit
de la famille.

Mon pĂšre se tue Ă 
la tĂąche” ou “ma mĂšre nous embĂȘte encore avec
ses bonnes oeuvres”, cela est dit avec humour et
ironie mais au fond de lui-mĂȘme le jeune est fier de
découvrir que ses parents existent aussi au sein de
la sociĂ©tĂ© civile. La pierre d’Ă©choppement de cette
autonomie est bien sĂ»r l’argent. A ce titre F. Dolto
regrette le décalage entre la France et les USA, par
exemple, oĂč les jeunes arrivent Ă  s’affirmer en ayant
la possibilitĂ© de gagner de l’argent tout en Ă©tant scolarisĂ©s,
c’est mĂȘme la rĂšgle du jeu que de participer au financement
de ses Ă©tudes.

La violence

“A cet Ăąge lĂ , tous les jugements portent,
y compris ceux qu’expriment des gens qui ne
sont pas vraiment crédibles, par exemple
des gens jaloux, qui en veulent aux parents”

La violence Ă  laquelle
l’adolescent se trouve confrontĂ© et qu’il manifeste
souvent est inscrite dans la crise qu’il traverse. La
violence physique liĂ©e Ă  la dĂ©linquance n’en est pas
la seule forme. Le chantage affectif imposĂ© “pour
notre bien” ou parce que “cela ferait trop
de peine” Ă  telle ou telle personne est bien une
authentique violence parce qu’il concourt Ă  un Ă©touffement
organisé sous le masque de la plus grande gentillesse
apparente.

La violence est multiforme
: enfants battus ou agressés, inversement parents victimes
de violence physiques de la part de leurs enfants, violence
sexuelles, rapports de force au sein de la bande, délinquance,
suicide. Mais le point commun Ă  toutes ces violences
est le mutisme. Les adolescents qui deviennent muets
dans les cabinets médicaux, qui sont venus pour une
demande prĂ©cise et qui ne l’expriment pas, sont bien
connus des médecins. Or la réponse réside justement
dans cette anti-violence qu’est la parole. “Oser
parler”, tout est lĂ  pour F. Dolto. “On peut
toujours trouver un ou plusieurs adultes pour aider.
Mais pour cela il faut commencer par demander, sinon
rien ne se passe. Pour rĂ©veiller l’envie d’aider, il
suffit d’aider, il suffit souvent d’avoir une idĂ©e et
d’en parler. Quelquefois, l’effet est magique, il faut
oser…”

La drogue

“Donner la parole aux jeunes, ce n’est pas
passer le micro Ă  un leader qui s’exprime
au nom des autres, ni lui faire remplir
une grille de questions conçues par des adultes,
c’est laisser chacun ĂȘtre son propre porte-parole”.

D‘aprĂšs une Ă©tude de l’INSERM
sur la santé des adolescents en France publiée en 1988,
l’usage non seulement des produits psychotropes mais
de ce redoutable cocktail qui associe la drogue douce
et l’alcool se banalise d’une maniĂšre trĂšs considĂ©rable.
PrĂšs d’un garçon sur 2 et une fille sur 3 fument au
moins dix cigarettes par jour. 52% des garçons, 21%
des filles font consommation d’alcool. Les chercheurs
ont observĂ© que l’usage du tabac, de l’alcool aussi
bien que de la drogue douce est toxicomaniaque.

“On se pĂšte” pour combler un ennui, une asthĂ©nie,
une apathie qui se généralise, les troubles du sommeil,
signe de difficultés transitoires ou permanentes, ne
sont pas rares entre quinze et vingt ans. Dolto y voit
le prix Ă  payer pour une enfance protĂ©gĂ©e et en mĂȘme
temps victime de la paralysie des Ă©changes familiaux.

Par rapport aux drogues
dures, Dolto ne croit pas au discours traditionnel des
adultes : “Attention, la frontiĂšre entre drogue
douce et dure est perméable, les dealers vous mettrons
dans l’engrenage”. Il est perçu comme moralisateur
par les jeunes. Elle préfÚre un autre plus concret :
“C’est vrai que tu t’en passerais sans cure de
dĂ©sintoxication. Mais tu ne peux pas dire que ça n’inhibe
pas ton vouloir-vivre et que ça ne te dissuade pas d’agir,
de faire face à tes responsabilités, pendant que tu
fumes, tu ne fais pas autre chose. Et aprĂšs tu n’ plus
envie de faire autre chose”. Le jeune dit Ă  l’adulte
: “Votre sociĂ©tĂ© ne m’intĂ©resse pas. Elle ne m’accueille
pas”. A l’adulte de rĂ©pondre : “C’est vous
qui la changerez. Ce n’est pas en dormant ou en planant
que vous obtiendrez moins d’injustice dans le monde”.

Une histoire
Ă  soi

Nous avons tous une histoire.
L’assumer, telle est la clĂ©. Cette histoire est la nĂŽtre
et rien ni personne ne peut nous la confisquer. elle
est tissée de joies, de peines, mais cette trajectoire
dans la vie, c’est nous. Il ne sert Ă  rien de rĂȘver
d’une histoire, de s’imaginer par exemple qu’on aurait
pu avoir d’autres parents.

On peut conseiller Ă  un
adolescent “d’enterrer” son passĂ© en faisant
l’arbre gĂ©nĂ©alogique de sa famille. De toute façon ce
sera planter un arbre. C’est important de savoir d’oĂč
on vient. C’est Ă  un vĂ©ritable “trĂ©sor de passĂ©
auquel un adolescent peut avoir accĂšs, par exemple,
en discutant avec ses grands-parents. Se réapproprier
son histoire, c’est aussi l’assumer sans culpabilitĂ©
: “le sentiment de culpabilitĂ© est un poison violent
pour l’ĂȘtre humain. Parfois ce sont les choses cachĂ©es
dans notre histoire qui sont les plus douloureuses et
culpabilisantes, elles nous empĂȘchent d’avancer, de
nous dĂ©velopper. Ce passĂ© qui nous encombre, c’est cela
qu’on appelle une nĂ©vrose…

Rien, chaque jour, n’est
jouĂ©. Aucun passĂ© ratĂ© n’empĂȘche d’avoir un bel avenir.
Cela l’adolescent, cet ĂȘtre au futur, porteur de tous
les possibles, doit pouvoir s’en convaincre.


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