Les dispositions hygiéniques applicables à la restauration collective

26/05/2014

Lapin

Alimentation et Santé

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L’alimentation et les repas en accueils collectifs de mineurs ne se réduisent pas à des questions d’hygiène ou à des normes de sécurité. Cependant, comme le montre le récit « La cuisine : un espace d’animation[1], » une connaissance des règles et des bonnes pratiques conforte les équipes dans la participation des enfants à la cuisine et dans l’organisation de repas qui soient des moments de plaisir, d’expression de savoir-faire et d’échanges.
 
 
Introduction
 
Afin d’harmoniser les conditions générales d’hygiène des denrées alimentaires présentes sur le marché communautaire, dans un souci de protection de la santé humaine, la Commission européenne a élaboré à partir de 2002 un ensemble de textes européens constituant ce qu’on appelle le « paquet hygiène. » Ces dispositions proposent une approche transversale, dite « intégrée, » qui a remplacé progressivement la multitude de règlements thématiques et spécifiques. Ainsi, l’hygiène des établissements de restauration collective à caractère social qui avait fait l’objet de l’arrêté du 29 septembre 1997 a été progressivement fondue dans différents textes normatifs plus généraux.
 
Les dispositions suivantes s’appliquent à tous les établissements de restauration à caractère social sans exception, que leur service soit effectué à titre gracieux ou onéreux. Sont ainsi concernées aussi bien la cuisine centrale d’une municipalité préparant plusieurs dizaines de milliers de repas par jour – dont certains seront destinés à l’accueil de loisirs – que la cuisine d’une colonie de vacances préparant en interne quelques repas seulement.
 
Faisons le point sur les obligations et les conseils maintenus et sur les nouveautés.
 
 
Les obligations et les principes d’hygiène toujours applicables à la restauration collective
 
La restauration collective, qu’elle soit réalisée en interne – éventuellement avec les enfants – ou confiée à un prestataire, doit respecter les règles générales en matière d’hygiène des denrées alimentaires, parmi lesquelles on peut citer :
  • la garantie de la sécurité des denrées alimentaires à toutes les étapes de la chaîne alimentaire depuis la production primaire ;
  • le maintien de la chaîne du froid pour les denrées alimentaires qui ne peuvent pas être entreposées à température ambiante (ex : produits réfrigérés ou congelés) ;
  • l’application généralisée de procédures fondées sur les principes HACCP à l’aide notamment des guides officiels de bonnes pratiques (ex : Restauration collective de plein air des accueils collectifs de mineurs, novembre 2010, réf. 5940 – télécharger le pdf 631 Ko) ;
  • les analyses microbiennes et les contrôles de la température fondés sur une évaluation scientifique des risques.
 
Tous les exploitants du secteur alimentaire, hors production primaire (les restaurants collectifs, mais aussi les traiteurs, les plateformes de distribution vers les grandes surfaces, les grossistes, les restaurants commerciaux…) doivent également respecter des dispositions plus précises relatives aux locaux, au transport éventuel des denrées, aux équipements, au traitement des déchets, à l’alimentation en eau potable, à l’hygiène et à la formation du personnel, au conditionnement et à l’emballage des denrées alimentaires et à leur traitement thermique.
Ces dispositions étant variées et dispersées à travers différents textes normatifs (au niveau européen, le règlement CE n°852/2004, et au niveau national, de multiples décrets codifiés dans le Code rural et de la pêche maritime, le Code de la consommation ou le Code de la santé publique), nous vous conseillons de vous référer à un guide accessible sur la toile. Parmi eux, on peut citer :
  • le guide des bonnes pratiques pour les restaurateurs (10 pages) élaboré par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Vienne en novembre 2012 : clair, concis et illustré, c’est un document très accessible : télécharger le pdf 889 ko ;
  • le livret « hygiène des aliments » 2012 (20 pages), élaboré par les DDCSPP et la DRAAF Languedoc-Roussillon : organisé en 8 fiches thématiques, c’est un document concret « qui va à l’essentiel » : télécharger le pdf 4,5 Mo.
 
De plus, les établissements publics ou privés assurant un service de restauration collective sont soumis à plusieurs disposition spécifiques figurant en annexe des arrêtés du 21 décembre 2009 et du 8 octobre 2013.
 
Températures limites maximales pour les denrées conservées au froid dans les établissements de restauration collective
 
  • Température limite minimale pour la liaison chaude : + 63°C.
  • Refroidissement rapide des plats (passage de + 63°C à + 10°C en moins de deux heures) et conservation dans une pièce dont la température est comprise entre 0°C et + 3°C.
  • Remise en température rapide (passage de + 10°C à + 63°C en moins d’une heure) et service des plats chauds à + 63°C minimum[2]. En aucun cas il ne peut y avoir un second refroidissement rapide après une remise en température.
  • Les dates limites de consommation (DLC) des préparations culinaires élaborées à l’avance (PCEA) sont de + 3 jours maximum[3].
  • Les excédents (dans le cas d’un self avec maintien de la température) peuvent éventuellement être resservis le lendemain aux enfants (mais pas les restes). Cette possibilité est ouverte aux restaurants satellites (les établissements desservis par une cuisine centrale) exclusivement pour les plats livrés en liaison froide, non déconditionnés et maintenus à température (- 18°C pour les surgelés et entre 0°C et +3°C pour les réfrigérés).
  • Conservation de plats témoins au moins 5 jours entre 0 et + 3°C.
  • Déclaration obligatoire des intoxications alimentaires collectives (au moins deux cas similaires) à la DDCSPP.
 
 
 
Les contrôles
 
Les agents qualifiés en matière de conformité et de sécurité des produits alimentaires[4] sont habilités à rechercher et à constater les infractions à ces règles. Ils peuvent ainsi prélever des échantillons, exiger la communication ou la copie de tout document – y compris informatique – propre à faciliter l’accomplissement de leur mission (ex : bon de livraison, menus affichés…) – et interroger le personnel.
Leurs comptes rendus d’inspection qui ne sont pas associés à une procédure de sanction – et c’est bien sûr l’écrasante majorité – fonctionnent comme des « audits » réalisés par des services publics et représentent une série de prescriptions à mettre en œuvre pour garantir l’innocuité des aliments (généralement assorties d’un délai).
 
 
Les changements introduits en 2013
 
L’abrogation totale de l’arrêté du 29 septembre 1997, dans le cadre de la réforme « paquet hygiène » présentée plus haut, a conduit à certaines modifications.
 
  • La durée de vie des produits décongelés en restauration collective (art. 18) n’est plus spécifiquement limitée à 4 jours. Cependant, les établissements souhaitant appliquer des durées de vie supérieures à 4 jours pour les produits décongelés doivent apporter la preuve, sur la base notamment de leur analyse des dangers (c’est la méthode HACCP), que la durée de vie appliquée offre le même niveau de sécurité pour le consommateur[5].
  • La fourniture d’un certificat médical de bonne santé et d’aptitude à la manipulation de denrées alimentaires n’est plus exigée pour le personnel (art. 28). Cette facilité permet d’éviter la situation ubuesque qui consistait à demander aux enfants un certificat médical attestant qu’ils présentent « un état de santé compatible avec la pratique de la cuisine[6], » comme le témoignait un participant du forum.
  • Les dispositions relatives à la fabrication sur place de viandes hachées crues (art. 24) ainsi que la limite de température maximum spécifique aux opérations de déconditionnement et reconditionnement (art. 41) sont abrogées.
 
D’autre part, pour les établissements d’accueil des enfants de moins de six ans, le programme national pour l’alimentation (PNA) a mis en place des principes pour l’équilibre nutritionnel des repas entrées en vigueur le 1er juillet 2013[7] :
  • le respect d’exigences minimales de variété des plats servis ;
  • la mise à disposition de portions de taille adaptée à l’âge de l’enfant ;
  • et la prise en compte de besoins particuliers propres à l’alimentation infantile.
Ces principes devraient être traduits dans des règles plus précises par un arrêté interministériel à paraître, comme ce fût le cas pour la restauration scolaire[8].
 
 
Conclusion
 
Si la restauration est l’un des rares domaines où l’organisateur a une obligation de résultat sur le plan civil (s’il est de droit privé) comme administratif (s’il est de droit public)[9], il reste globalement libre des moyens à mettre en œuvre. Bien évidement, les questions posées par les temps de repas risquent de déborder rapidement les seules considérations relatives à l’hygiène et à la sécurité, comme en témoignent les nombreuses discussions sur le forum planetanim. Vous en aurez un aperçu en faisant quelques recherches où en lisant quelques uns des sujets listés sur ce fil par crevette76 : bonne navigation et bonne lecture !
 
 
Lire également nos autres articles :
Alimentation Santé : Un guide pour la restauration de plein air (04/01/2011)
Réglementation : Se préparer à l’inspection (04/07/2011)


[1] Bataille J.-M. (dir) Enfants à la colo. Courcelles, une pédagogie de la liberté. Les Cahiers de l’action n°15. Marly-le-Roi, Injep, 2007 p. 77-78. Télécharger le pdf 778 Ko.
[2] « …sauf si une analyse des dangers validée a montré qu’une température inférieure n’entraîne pas de risque pour la santé du consommateur. » (annexe IV al. 3 de l’arrêté du 21 décembre 2009 et annexe II al. 3 de l’arrêté du 8 octobre 2013)
[3] Certaines cuisines peuvent néanmoins fonctionner avec des DLC + 5 jours (cf. le protocole défini par la note de service du ministère de l’agriculture n°DGAL/SDSSA/N2012-8054 du 8 mars 2012 p. 23-24 mettant à jour la note n°DGAL/SDSSA/N2011-8117 du 23 mai 2011 Télécharger le .pdf 197 Ko)
[4] De nombreuses autorités nationales sont qualifiées pour la recherche et la constatation des infractions en matière de conformité et de sécurité des produits. Si les services vétérinaires sont régulièrement cités par les revues spécialisées, comme le « Mémento de la réglementation » du Journal de l’Animation ou le « Spécial Directeur » de la JPA, on peut y ajouter les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, de la direction générale des douanes et de la direction générale des finances publiques ou les agents de l’État agréés et commissionnés par le ministre de l’Agriculture.
[5] Note de service du 8 mars 2012 Op. Cit. p. 26 Télécharger le pdf 197 Ko.
[6] Al-Batros en juin 2008 sur le sujet activités cuisine (post #20)
[9] CAA Douai 2e ch. 3 juin 2012 n°99DA20384

Photo : auteur inconnu [Public domain], via Wikimedia Commons

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