Extrait d’un lien cité il y a peu sur le forum :
Donc l’enfant sera exorcisé et éliminé, en tant qu’être naturel, comme anomalie, comme survivance anachronique en un temps de performance optimale immédiate. Simultanément, il deviendra une espèce sauvage, délinquante, criminelle. Il perdra la croyance qu’il est un enfant, cessant de se comparer péjorativement au modèle de l’adulte. Sans doute n’a-t-il jamais cessé d’être un être potentiellement dangereux – réalité masquée par la pédagogie et l’idéalisation moderne et bourgeoise de l’enfance – ni cessé de se venger de son infériorité à sa façon, par la ruse et le chantage, mais cette subordination et cette revanche n’étaient que relatives puisqu’elles étaient vouées à disparaître, avec le temps précisément. Or, cette fois, c’est justement le temps qui va faire défaut à l’enfance et, du coup, la chaîne évolutionniste est brisée : il va se retourner contre l’adulte comme ennemi à part entière. Il deviendra quand même l’Autre, mais comme Alien – monstre issu de la rupture de la chaîne symbolique des générations.
La réalité était celle de l’adulte (ce n’est même plus vrai aujourd’hui, où il n’en est plus maître). L’enfance était, du fond de son irréalité, du fond de son idiotie, un des derniers bastions de l’illusion poétique du monde. Comme toutes les autres formes d’illusion, elle est vouée à l’extermination à plus ou moins long terme – ou à une pure existence supplétive : l’enfant, non plus du tout comme destin, comme accident porteur de mort en même temps que de jubilation pour les parents, mais l’enfant comme commodité, malheureusement inintégrable dans le cycle de l’échange accéléré et donc devenu produit erratique, produit d’un autre âge, flottant la plupart du temps entre des parents qui ne savent plus quoi en faire.
Mais qui comme les morts, comme les femmes, comme les masses, comme l’objet, comme toutes les catégories expulsées de la raison dominante, conservent tous les moyens de se venger et de poser aux maîtres de réalité un problème insoluble.
On peut aussi vivre sans se poser de question, à votre façon…
Et ne jamais se poser la question par exemple de “pourquoi je fais de l’animation ?”